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Voir élans, cerfs et chevreuils à Bialowieza (Pologne)


La forêt de Bialowieza abrite 3 cervidés :
– l’élan (mâle ci-dessous à gauche) : ils sont une 100e sur le secteur.
– le cerf (jeune mâle ci-dessus au centre) : ils sont très nombreux.
– le chevreuil (mâle ci-dessus à droite) : ils sont très nombreux aussi.

Mais la zone véritablement protégée, le parc national de Bialowieza, est toute petite ; un carré de 5 km de côté ! La chasse est pratiquée autour du parc national malgré la mosaïque de réserves naturelles protégées et la pression générale des nombreux polonais naturalistes de la forêt de Bialowieza. Du coup, les cervidés ont une distance de fuite très importante. La même que celle qu’on a en France ! Les herbivores sont donc vigilants face aux 35 loups, aux 20 lynx et aux centaines d’Homo sapiens… et le relief est plat… et c’est la forêt.

Ce n’est pas grave, car vous allez venir expérimenté grâce à la lecture de cet article. On traitera d’abord cerfs et chevreuils qui exigent des stratégies similaires. On étudira le cas de l’élan dans une seconde partie.

Ci-contre : Portrait de chevrette
Cette femelle est dans un secteur de forêt marécageuse le long du sentier de Carska Tropina fin octobre 2025. Elle est seulement à 50 m de l’observateur mais la vagétation est dense, très dense. Elle joue la carte de l’immobilité. Elle n’est pas seule mais le second chevreuil est totalement invisible. Elle ne va pas quitter le photographe du regard pendant un quart d’heure, avant de quitter les lieux par petits sauts.

I ) VOIR CERFS ET CHEVREUILS
Il y a 4 stratégies possibles pour voir les cerfs et les chevreuils à Bialowieza. On les passe en revue ici de la moins favorable à la plus favorable.

1- la marche le matin ou le soir :
Malgré, les longs chemins rectilignes, c’est une stratégie peu efficace. Si vous aimez marcher et profiter avant tout de l’ambiance forestière, faites la randonnée de Carska tropina. On fait parfois détaller des biches (photo ci-contre). Avec de la chance, dans les zones marécageuses, on repère des animaux qui restent un peu cachés sans fuir… Les animaux sont patients et traversent assez souvent après votre passage, derrière vous.

2- la patience aux carrefours de chemins rectilignes tôt le matin
En se plaçant sur un carrefour en croix (en particulier ceux de Pojedynacki tryb), on voit loin dans 4 directions. On se positionne pour voir les deux chemins qui sont le plus face au vent. On s’assoit et on patiente. C’est une technique qui marche bien tôt le matin. Les cervidés circulent beaucoup parallèlement à la rivière Narwka. L’inconvénient, c’est qu’on voit les cervidés de loin et qu’on observe pas grand chose d’autre que des traversées de piste.

Ci-contre : Au premier plan, il y a la barrière qui marque une entrée du parc national au niveau de la voie ferrée. Au second plan, une biche traverse le Pojedynacki trib. Une autre va bientôt apparaître. Au 3e plan, en jaune, c’est la prairie marécageuse et les roseaux qui bordent la rivière Narewka.

3- la patience aux abords d’une clairière le soir :
C’est la meilleure stratégique pour les photographes. Il faut arriver discrètement deux heures avant le coucher du Soleil et se placer face au vent, en hauteur si possible ou/et derrière une toile d’affût.

Ci-dessus à gauche : mirador de la clairière Swinoroje.
Ci-dessus à droite : jeune cerf et biches dans la clairière du Graniczni tryb. Il y avait une 12e de cervidés au total.


Voici les clairières intéressantes (classées du Nord au Sud) avec une distance de marche (trajet aller) depuis la route la plus proche :
– Clairière au Sud de Gruszki (1 km) : un mirador accessible en 2025.
– Swinoroje (3 km): un mirador accessible (plus pour les sangliers et les bisons).
– Clairière du Graniczny trib (2 km) : mirador accessible.
– Worobiowa (3 km) : pas de miradors.
– Clairière de Debowy grad (1.5 km).
– Clairière au Nord du parc du palais de Bialowieza (400 m) : 2 bancs.
– Gierkowka (0.6 km) : mirador inaccessible (cadenacé en 2025).

En général, les animaux sortent au moment où le Soleil se couche. C’est rare de ne rien voir, mais on ne voit pas toujours ce qu’on cherche : bisons ? cerfs ? chevreuils , sangliers ? renard ?

Ci-contre : biche, éclairée avec une lampe électrique au retour d’un affût.

4- l’éclairage en circulant de nuit :
Ce n’est pas une solution idéale pour les photographes. Par contre, pour prendre conscience de l’importance des effectifs de cervidés, c’est la stratégie à ne pas rater, d’autant que la distance de fuite est beaucoup plus faible la nuit que le jour.
Il s’agit de rouler lentement sur la route de Narewkowska en éclairant le sous-bois, avec une très bonne lampe ou un projecteur. Les yeux des mammifères brillent et se repèrent immédiatemment. On s’arrête alors. On ne coupe pas le moteur et on reste dans le véhicule pour que les animaux ne fuient pas.

Ci-contre : un chevreuil immobile à 10 m de la route… C’est très fréquent de nuit.

La meilleure période pour voir le chevreuil va du rut (juillet-août) à la chute des bois (octobre). L’hiver reste une bonne période.
La meilleur période pour voir le cerf va du rut (fin septembre- début octobre) à la chute des bois (février-mars). On voit cependant peu de mâle fin octobre car ils sont épuisés par le rut.

II ) VOIR L’ELAN
L’élan est protégé en Pologne suite à un moratoire de 25 ans qui interdit sa chasse. Les Polonais espèrent voir augmenter les effectifs. Mais si vous avez la chance de croiser un élan, vous verrez qu’ils sont aussi timides que les cervidés chassés. Leur distance de fuite est supérieure à 250 m à découvert. Elle peut être plus basse si l’animal se sent à l’abri, caché dans un bosquet. L’élan a moins peur des véhicules que des piétons ici.

Comme il n’y a qu’une centaine d’élans sur la forêt de Bialowieza et qu’ils apprécient les secteurs marécageux denses, c’est un animal très difficile à observer. J’en ai vu seulement un en consacrant 8 jours à la forêt de Bialowieza.

Les meilleurs secteurs pour le voir sont :
– le long de la route entre Bialowieza et Pogorzelce.
– le long des petites routes et pistes carossables au Nord de Narewka.
– et tous les abords de rivière marécageux… mais là, c’est souvent à pied.

La meilleure période pour le chercher va de septembre à février :

– en période du rut (mi-septembre à fin octobre), il est plus mobile.
– en période « hivernale » (novembre à février), l’absence de feuilles le rend plus visible.

La meilleure technique consiste à circuler en voiture en inspectant le paysage avec des jumelles thermiques. Même bien caché dans la végétation, l’élan est alors trahi par la chaleur qu’il dégage.

En cas d’échec, si vous tenez vraiment à voir l’élan, il vaut mieux rejoindre le parc national de la Biebrza, à 170 km vers le Nord (2h30 de route). C’est la plus grande population de Pologne avec 400 à 500 élans.

Fin octobre 2025, depuis notre véhicule, on observait un renard au Nord de Narewka. Deux cents mètres devant nous, une voiture polonaise s’arrête un moment :
– « Ils ont vu quelques choses ». La voiture repart, mais ma partenaire confirme aux jumelles :
– « Il y a un truc plus grand qu’un cerf dans le bosquet ».
On avance lentement. On tourne sur une toute petite route pour avoir une meilleure visibilité. En effet, un élan mange les feuilles d’un arbuste au milieu d’un tout petit bosquet. On va stationner un peu plus loin en espérant qu’il sorte : Impossible de le photographier. Souvent, on ne voit que les feuilles qui bougent. Parfois on voit dépasser une partie des bois, parfois son cul blanc…

Il nous reste environ 2 heures avant la tombée de la nuit, mais après une demi-heure, on comprend que l’animal restera caché jusqu’à la nuit. On finit par décider d’agir. Je repasse sur la petite route et dépose ma partenaire. A pied, et en restant à grande distance, elle rejoint le point de vue opposé. Moi, je me replace sur la petite route, loin. Je sors du véhicule et j’utilise le capot comme pied pour mon appareil photo. Ma partenaire avance très lentement. Elle est encore à 200 m du bosquet quand l’élan, dérangé, décide de sortir (photo ci-dessus). Il va me voir aussi et se mettre au trot le long de la lisière (photo ci-contre) pour traverser la petite route et regagner la grande forêt.



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