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Voir la loutre d’Europe en Espagne

Loutre d’Europe (Lutra lutra)
DIFFICULTE : d’assez facile à extrêment difficile selon les régions.
EFFECTIF : Inconnu
DISTANCE DE FUITE : très variable ; 25 m au minimum pour des animaux qui n’ont pas été nourris par l’homme.

La loutre d’Europe est :
– la seule loutre présente en Europe (sur 14 espèces dans le monde).
– un des 2 représentants du genre Lutra avec la loutre de Sumatra (Lutra sumatrana).
– la loutre la plus largemment répartie.


Photo 1 à 8 : Loutre d’Europe en Espagne
Toutes les photographies ont été prises sur le secteur d’Encinarejo dans le parc naturel Sierra de Andujar en Espagne (fin décembre 2024).

Il est assez facile de repérer si la loutre est présente sur un cours d’eau. Par contre, la voir, la photographier, est très difficile. Et pour cause, la loutre est plutôt nocturne, plutôt solitaire et elle circule sur des tronçons de rivières de 5 à 15 km en moyenne. Voir la loutre est un beau défi.


Photo 2 : Loutre au Soleil
La loutre est plutôt nocturne. Il n’y a que sur les sites où elle est protégée depuis longtemps qu’elle se montre en pleine journée.



OU ?
En Espagne, la loutre est potentiellement présente sur tout le pays à l’exception des îles. C’est dans la partie pyrénéenne que les observations sont les plus nombreuses. Cependant dans cette partie nord, les données sont surtout liées aux indices de présence et aucun site ne se détache particulièrement.

1 : Encinarejo, le meilleur spot :
Ce spot se situe dans la parc naturel Sierra Morena de Andujar, au Nord de l’Andalousie.

Les naturalistes viennent dans ce secteur d’abord pour chercher le lynx pardelle (voir l’article le lynx ibérique) et font souvent une journée loutre.

On accède au secteur d’Encinarejo par la A6177 (route qui mène au Sanctuaire Virgen de la Cabeza), soit en venant d’Andujar (par le sud), soit en venant de Puertollano (par le Nord). Arrivé au pont qui traverse la rivière Jandula, il faut prendre la large piste carossable qui remonte le cours d’eau et la suivre sur 3 km. On se gare le long de cette piste quand on remarque un affût aménagé environ 800 m avant le barrage.







Photo 3 : Mouille favorable du site d’Encinarejo :
La berge est très végétalisée. La caliche est dans la végétation à droite de la photographie.

On découvre généralement la mouille la plus favorable en se plaçant derrière l’affût en bois, sous les pins, au centre de la photo. Cet affût est un peu trop loin de la rivière et on aura intérêt à s’avancer un peu tout en restant dissimulé.

Le meilleur emplacement dépend de vos objectifs :
– pour voir l’ensemble de la mouille : il faut se placer sur l’énorme rocher en aval. On a ici une bonne vision d’ensemble mais on est souvent à contre-jour.
– pour affûter le soir : il faut se placer en rive droite (celle qu’on voit sur la photographie). Les observateurs se mettront en hauteur derrière la végétation. Les photographes auront intérêt à s’allonger sur le rocher au bord de l’eau (au centre de la photo). En restant derrière ou avec l’appareil dessus. Une loutre est restée 5 m devant moi ici avant de poursuivre sa pêche et de revenir devant moi.
– pour affûter le matin : il vaut mieux se placer sur l’autre rive. Pour cela, il est plus simple de se garer au barrage, de traverser le pont et de redescendre la rivière jusqu’à la mouille. Il faudra rester derrière la végétation ou, avec une tenue camouflage, s’allonger dans l’herbe et rester immobile.

A défaut, on pourra rechercher un cours d’eau favorable ailleurs.

COMMENT CHOISIR UNE RIVIERE ?
La rivière la plus favorable selon 2 critères :
– la quantité de poisson : la loutre d’Europe est avant tout piscivore même si elle complète ses repas par tous les vertébrés de taille modeste et par des écrevisses. La loutre est donc peu présente sur les rivières polluées car les poissons y sont moins nombreux.
– la végétalisation des berges : la loutre a besoin de talus végétalisés pour creuser sa caliche (= tanière de la loutre). L’entrée est souvent cachée dans l’eau et entre les racines. Le conduit d’aération est également caché dans la végétation. La loutre utilise aussi les berges pour s’alimenter à terre.

Photo 4 : Jeune loutre en début de nuit.
Un objectif très lumineux convient mieux à la photographie des loutres.

COMMENT S’ASSURER DE LA PRESENCE DES LOUTRES ?
Pour repérer la présence des loutres, les professionnels utilisent des protocoles. En voici un parmi les plus simples :
1 – Sur une carte, repérer les ponts qui franchissent la rivière inspectée. Le dessous des ponts est un passage obligé pour la loutre sur son territoire. C’est également le lieu idéal pour marquer son territoire.

2 – Avec des bottes (ou un canoé) et une paire de jumelle, on recherche les indices de présence sous le pont et jusqu’à 50 m en amont et en aval.


Photo 5 : Respiration :
Cette loutre d’Europe prend sa respiration avant de plonger pour pêcher. Elle reste souvent seulement une minute sous l’eau, mais les plongées peuvent atteindre 4 minutes.


Les indices de présence fiables sont doubles :
– les empreintes (voir la photo 6, ci-dessus à gauche.): les traces de loutre dans la boue des berges sont caractéristiques (5 doigts ; 6 cm de long pour les pattes antérieures et 7 cm pour les postérieures) mais on n’en voit pas très souvent. Parfois, la marque ne présente que 4 doigts mais l’axe de symétrie permet de deviner la position du 5e. La neige permet de détecter plus facilement la loutre.
– les épreintes (voir la photo 7, ci-dessus à droite) : il s’agit de petites crottes (« épreindre » signifiait déféquer par petits tas) constituées de restes de poissons avec des arêtes et des écailles. Leur forte odeur de poisson permet de les identifier facilement. Leurs tailles et leur formes sont variables. Elles sont verdâtres fraîches puis virent au noir. Elles sont grises au bout de plusieurs jours. Certaines vont résister à l’épreuve du temps 3 mois. Les loutres les utilisent pour marquer leur territoire. Elles sont donc placées à des endroits stratégiques : toujours sur la rivière ou la berge ; souvent en hauteur pour que l’épreinte ne disparaisse pas à la première montée du niveau de l’eau et de préférence, à l’abri de la pluie pour être efficace plus longtemps… Un gros rocher sous un pont est le lieu parfait. Les épreintes sont faciles à trouver si la loutre est présente de manière permanente.

Photo 8 : Pas vu, pas pris : La loutre repère facilement les silhouettes et le mouvement.

Photo 9 : En déplacement
La loutre nage à l’aide de ses pattes, les postérieures en priorité, et son rythme habituel est de 3 à 4/h donc celui d’une personne qui marche. C’est plus rapide que le rythme habituel des castors ou des ragondins !


COMMENT CHOISIR LA ZONE D’AFFUT ?
Une bonne zone d’affût présente :

– une mouille ou un étang de bonne taille : les loutres sont très mobiles. Leurs mouvements et les bulles qui s’échappent quand elles plongent sont beaucoup plus repérables dans les eaux stagnantes ou faiblement courantes. Les étangs proches des rivières sont souvent des zones de repos.

– des berges avec une végétation diversifiée : les loutres viennent généralement manger à terre ou sur des rochers hors de l’eau. La berge doit également vous permettre de bien voir sans que votre silhouette se détache. L’idéal est de se placer derrière un tronc, un rocher. Ce n’est pas toujours possible.

– une relative proximité avec la catiche : c’est souvent très difficile de repérer la catiche. Elle est parfois assez loin de l’eau pour éviter les inondations. C’est un tronc creux entouré de nombreuses racines, une cache dans des rochers, un terrier creusé par un autre mammifère ou une galerie dans une végétation très dense.
Pour trouver la catiche, l’idéal est de placer une série de pièges photographiques à déclenchement rapide sur les seuils des rivières. On pourra ainsi repérer le sens des déplacements le soir et le matin. Cette technique est coûteuse et exigeante en temps. Si la catiche est repérée, il ne faut pas se mettre à proximité pour éviter le dérangement, en particulier dans les pays où elle a été persécutée comme en France. Il faut se poster au minimum à une centaine de mètres et sur la rive opposée. A défaut, il faut choisir la mouille la plus proche.

Photo 10 : Chasse
Cette loutre gardait toujours le même sens de rotation dans son bassin de chasse. Il était possible d’anticiper sa trajectoire.

QUAND ?
On peut essayer toute l’année. La loutre est un peu moins difficile à observer en hiver (janvier, février, mars). Ceux qui ont repérer une catiche peuvent affûter au printemps pour profiter des jeunes.
A l’échelle quotidienne, la loutre est essentiellement nocturne. Le meilleur moment pour l’observer est tôt le matin. A défaut, le soir reste favorable. En hiver, dans les secteurs sans pression de chasse depuis longtemps, on peut voir la loutre en pleine journée.

L’idéal est de prévoir une nuit sur place : repérer les lieux en randonnant en journée, affiner les zones favorables le soir en cherchant les loutres et faire un affût dès l’aube le lendemain.

Photo 11 : Loutre sur un site de repas
Cette loutre revient régulièrement ici, où un rocher est juste sous la surface de l’eau, afin de manger son poisson.


COMMENT ?
La loutre est un animal intelligent :
– les loutres qui ont été nourries par l’homme s’approchent très facilement et adoptent un comportement familier.
– les loutres qui ont été chassées sont très farouches et plus strictement nocturnes.
L’observateur doit donc adapter sa stratégie à l’histoire du secteur dans lequel il prospecte.

Dans les secteurs fréquentés par les touristes et préservés depuis longtemps comme sur le spot d’Encinarejo, on peut observer à la jumelle légèrement en retrait des berges. Les photographes peuvent se contenter d’un affût sommaire. Certains, habillés en tenue de camouflage, s’allongent sur l’herbe à découvert. La loutre repère surtout le mouvement et les silhouettes. Il s’agit donc de rester immobile quand la loutre est en surface. Et de bouger lentement quand elle est en plongée.



Photo 12 : Dernière photo avant la nuit

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