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Voir la baleine à bosse

Baleine à bosse (Megaptera novaeangli)
DIFFICULTE : Assez facile ; C’est la baleine la plus fréquente et la plus facile à voir.
DISTANCE DE FUITE : Parfois nulle ; mais il convient de respecter une distance de 50 m au minimum ; 80 m pour une baleine avec son baleineau.
EFFECTIFS : 84 000 en 2020 ; Classée en préoccupation mineur, c’est une des baleines dont les effectifs sont les plus importants.

La baleine à bosse porte de nombreux noms :
– baleine à bosse : ce nom est lié à la forme arrondie que montre cette baleine quand elle plonge (voir la photo 2). Il s’agit en réalité de la dernière partie du corps située juste avant la queue. C’est l’observation la plus courante en mer.
– jubarte : en ancien français, « gibbus » signifiait « bosse ». Au XVIIe siècle, les marins français l’appelaient « gibbar » et le mot à été repris par les Anglais en devenant « jubartes »… Bref, c’est le nom populaire.
– Mégaptère : du nom scientifique megaptera qui signifie « grandes ailes » et qui fait référence aux immenses nageoires pectorales. C’est un critère distinctif très net qui permet de facilement déterminer l’espèce.

Sauf indication contraire, les photographies présentées ici sont prises dans la baie de Samana en République dominicaine (février 2016).

Photo 1 : Nageoire caudale
Cette photo est prise depuis un navire qui fait à la fois un suivi scientifique et des sorties pour les touristes. En théorie, un bateau ne doit pas se trouver sur la trajectoire d’une baleine… Dans la pratique, les baleines peuvent changer brusquement de trajectoire et les règles déontologiques sont mal respectées partout.

Photo 2 : La bosse
La baleine plonge (« Dive »): les 2/3 de la baleine sont déjà sous l’eau à droite. La nageoire caudale va sortir à gauche. Au sommet de la bosse, la nageoire dorsale, ici petite, permet parfois de reconnaître un individu à l’échelle individuelle. Le navire scientifique sur lequel je me trouve signale aux autorités que la petite embarcation au second plan ne respecte pas les distances préconisées
.

La baleine à bosse est la baleine la plus populaire :
– c’est la plus démonstrative, la plus joueuse, la plus sauteuse.
– c’est la plus photogénique avec ses grandes nageoires pectorales.
– c’est la plus largement répartie (encore plus largement que la grande baleine bleue) et ses effectifs se sont bien reconstitués.
– ses migrations suivent les meilleures périodes météo des touristes.

Photo 3 : Le dessous de la queue
A chaque fois qu’elle plonge, la baleine à bosse dévoile le dessous de sa queue. C’est un trésor pour les scientifique car la répartition et la forme des taches noires et blanches permettent de distinguer chaque individu, de les ficher, cataloguer… et parfois de les retrouver les années suivantes.

Photo 4 : Groupe actif
On appelle groupe actif, des mâles (ici, on en voit deux, mais il y en a un 3e) qui sont rivaux pour séduire une femelle. Ils nagent en parallèle, se donnent des coups de tête et de corps, parfois jusqu’au sang… .

Photo 5 : Souffle ou jet
La respiration commence par une exhalation appelé souffle ou jet. Ce n’est que de l’air chaud expulsé dans de l’air plus frais. C’est ce souffle qui permet de repérer les baleines de loin. Un souffle de vie, qui à souvent été à l’origine de leur mort quand les baleines étaient chassées. Le souffle de la baleine à bosse atteint au maximum 3m. Ensuite, la baleine prend sa respiration et peut à nouveau plonger en moyenne 5 à 15 minutes (maximum 40 minutes) en fonction de leur taille.

OU ET QUAND ?
La baleine à bosse est présente dans tous les océans du monde. C’est un animal migrateur d’où l’importance d’associer la question « où ? » à la question « quand ? » :
– en été, elle s’alimente dans les régions polaires : elle se nourrit de krills et de petits poissons dans les régions qui sont les plus propices pour le faire. Elle fait ici les réserves de graisse pour toute l’année.
– en hiver, elle se reproduit dans des régions tropicales : elle ne fait rien d’autre que l’ensemble des activités liées à la reproduction (naissance des baleineaux, compétition entre mâles, accouplements, chants des mâles…). Les sites où les baleines sont les plus nombreuses sont les plus propices aux naissances des baleineaux avec une eau chaude et peu agitée.
– au printemps et en automne, elle migre : de 2 à 6 000 km.

Ce tableau est complexifié par une petite population (250 individus) de baleines à bosse sédentaires au large de la péninsule arabique.

Au total, les baleines à bosse sont présentes partout sauf dans les mers fermées ni propices à la reproduction, ni à l’alimentation (c’est par exemple le cas de la mer méditerranée même si, avec la reconstitution des effectifs, il arrive qu’un individu s’y aventure). Il est aussi très rare que les baleines à bosse franchissent l’Equateur.

Photo 6 : Vue du ciel
Whitsundays ; Queensland ; Australie (août 2016).


Les observations naturalistes sont les plus importantes aux Etats-Unis. Le pays possède à la fois une grosse zone de reproduction (Hawaï), une grosse zone d’alimentation (l’Alaska) et les migrants longent les côtes américaines.
Les observations naturalistes sont ensuite réalisées en Antarctique, au Canada, en Australie, au Mexique, en Nouvelle-Zélande, en République dominicaine, à la Réunion et en Islande… Ces statistiques favorisent clairement les très grands pays développées.

En réalité, les meilleurs types de sites d’observations sont :
– A : les sites de reproduction : l’avantage est triple avec une forte densité de baleines, une multitude de comportements démonstratifs et une météo chaude. L’inconvénient, c’est l’éthique… On dérange les baleines au moment où les baleineaux sont fragiles.
– B : les sites d’alimentation : l’avantage est double avec une forte densité de baleine et une observation plus éthique (encore que ?). L’inconvénient principal est la météo aléatoire avec une mer parfois agitée.
– C : en migration : en observant depuis la côte, on est loin. C’est propice à la méditation et totalement éthique.

Photo 7 : Queue juste avant la plongée
Husavik ; Islande (juillet 2008).


Finalement, les meilleurs sites sont :
Sur les zones de reproduction :

– 1 : la baie de Samana (République dominicaine) du 15 janvier au 31 mars : c’est sans doute le meilleur site d’observation des baleines à bosse. Au minimum 10 000 baleines arrivent dans les eaux de la République dominicaine. Au minimum 1 000 passent par la baie de Samana. Au coeur de la période de reproduction (mi février), on compte au moins 250 individus en même temps dans la baie. Ici, les possibilités de croisières d’observations sont nombreuses.

Au Nord de la République dominicaine, à 80 km au large, le banc d’Argent est une plate forme sous-marine protégée des courants par les récifs coralliens. Il a à peu près la forme d’un carré de 50 km de côté. Là, pendant la période d’activité maximale, plus de 3 000 baleines sont présentes. La zone est un sanctuaire à baleine. Seuls quelques navires (3 en général) ont des autorisations pour s’y rendre avec des touristes passionnés et fortunés. Il s’agit généralement de croisières d’une semaine avec des observations depuis de petits bateaux et des possibilités de nager avec les baleines. On reste en surface (les bulles effraient les cétacés) et c’est les baleines qui doivent choisir d’approcher.

– 2 : Hawaï (Etats-Unis) en février-mars : environ 10 000 baleines à bosse migrent vers les eaux peu profondes d’Hawaï et en particulier à Maui, une des aires de reproduction et de mise bas préférée. Elles viennent de l’Alaska et arrivent en janvier.
Le phare de Makapu’u Point à l’extrémité Est de l’île d’o’ahu (25 km à l’Est d’Honolulu) est un excellent site pour les observer depuis le rivage.

– 3 : Tonga entre août et mi-septembre : c’est un excellent site beaucoup moins fréquenté que les autres.

– 4 : Nosy Be (Madagascar) : environ 1 000 baleines à bosse visitent Madagascar en juillet-août. Nosy Be et l’île Sainte-Marie sont les meilleures bases de départ pour les observer depuis des bateaux. On pourra également les voir depuis le Mozambique (août et septembre) en rejoignant Ponta do Ouro et Tofo.

Photo 8 : Rolling
La baleine tourne sur son axe entre 45 et 360°, montrant l’extrémité d’un nageoire pectorale.


Sur les zones d’alimentation :
– 5 : Juneau ; Alaska du Sud-Est (Etats-Unis) d’avril à novembre : le site est excellent mais avec accessible uniquement en bateau ou en avion et avec les tarifs qui vont avec.
– 6 : Péninsule antarctique de novembre à juin : C’est une bonne destination en croisière.
– 7 : Parc national Forillon (Canada) de juillet à septembre : On peut en voir depuis le rivage dans la baie de Gaspé et dans les secteurs de Cap-Gaspé, Cap Bon ami, Cap des Rosiers. Des sorties baleines sont possibles tous les jours (6 espèces différentes sont potentiellement visibles).
– 8 : Husavik (Islande) d’avril à septembre : c’est probablement le meilleur site en Europe pour voir des baleines de plusieurs espèces. On a quand même l’impression de déranger les cétacés ici… Islande, Norvège et Japon sont les derniers pays à chasser les baleines. L’Islande devrait stopper l’activité en 2024. Elle n’est plus rentable face à la concurrence japonaise.

Sur les routes migratoires :
– 9 : Sud-Est australien :

Au Queensland : aux larges des îles Whitsunday (juillet à septembre); Fraser Island et Hervey Bay (fin juillet à début novembre); au large de Brisbane et notamment de Sunshine Coast, Gold Coast et à Moreton Bay (juin à novembre).
En Nouvelle-Galles du Sud : à Jervis bay sur la côte Sud de Sydney (mai-juin et septembre-novembre) ou au phare de Byron Bay (juin à octobre).
En Tasmanie : l’île de Bruny et Great Oyster Bay sur la péninsule Freycinet sont les principaux sites d’observation entre mai et octobre.
– 10 : Mull et le Nord-Ouest de l’Ecosse en été : Mull est la 2e plus grande île des Hébrides. Une association, Hebridean Whale and Dolphin Trust, basée à Mull, organise des sorties en mer et est à l’origine du Hebridean Whale Trail, 33 haltes panoramiques le long de la côte ouest de l’Ecosse. On peut y observer baleines à bosse, baleine de Mike et au moins 5 espèces d’odontocètes en toute tranquillité.

Photo 9 : Escargots
Remarquer les escargots agrippés sur les bouts extérieurs de la nageoire caudale. Une baleine de 15 m transporte environ 450 kg d’escargots…


COMMENT ?
C’est le comportement des baleines qui est le plus intéressant à observer :
On observera facilement :
– les évents (photo 11) et le Souffle (photo 5).
– la plongée, « Dive » (photo 2) qui vaut son nom à la baleine à bosse.
– la nageoire caudale (photo 1, 3, 7, 10) : elle est facile à photographier parce que la baleine « montre sa bosse » juste avant.
On observe moins facilement :
– le « rolling » (photo 8).
– le saut (photo 10).
On observe encore plus rarement :
– « tail flash » : la baleine frappe l’eau avec sa queue.
– « flippering » : la baleine, allongée sur le côté, frappe l’eau avec sa ou ses nageoires pectorales.
– « spyhop » : la baleine sort la tête de l’eau verticalement puis redescend.
– « tail lob » : la baleine lève la queue verticalement parfois jusqu’à laisser entrevoir les partie génitales. Le corps reste horizontal.
– « headstand » : la baleine lève la queue verticalement puis la laisse s’enfoncer dans l’eau. Le corps est en position verticale.
– « logging » : la baleine flotte. Elle semble en train de dériver endormie.
– « trumpeting » c’est un souffle avec un son qui rappel un barrissement.
– la chasse en groupe : sur les zones d’alimentation, des baleines piègent des bancs de poissons dans un rideau de bulles. Les animaux remontent à la surface ensemble, gueule béante.

Il est très compliqué de différencier les sexes sur les critères morphologiques :
– les femelles sont légèrement plus grandes que les mâles mais ce n’est pas visible en mer.
– les femelles ont un lobe de la taille d’un petit pamplemousse au bout de la rainure génitale.
En période de reproduction, on devine le sexe au comportement :
– une grosse baleine et une petite toute proche : c’est une femelle et son jeune.
– deux grosses baleines : c’est généralement une femelle courtisée par son « galant ».
– trois baleines et jusqu’à 35 : c’est une femelle fertile suivie par des mâles concurrents. Au début, cela ressemble à une procession mais ils finissent par lutter.
– les mâles sont les seules à chanter. On peut les écouter avec un hydrophone. Ils chantent tous la même mélodie. En début de saison, c’est la mélodie de la fin de la saison précédente. La chanson va être transformée petit à petit par tous les mâles.
Photo 10 : Saut
Il n’est pas trop difficile de voir sauter une baleine à bosse. Par contre, réussir une belle photographie exige du temps. Certaines baleines en enchaînent plusieurs (un jeune mâle en a réalisé 135 en 75 minutes). En général, il s’agit de mâles excités. Ils cherchent à montrer leur force.

Photo 11 : Events et nodules
Les nodules sont les protubérances (de la taille d’une orange) sur la mâchoire supérieure. Ils sont surmontés d’un poil sensible.

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