Ours à lunettes (Tremarctos ornatus)
DIFFICULTE : Très difficile
DISTANCE DE FUITE : très variable… l’ours à lunettes a la réputation d’être timide mais il est possible de l’observer à 10 m sans qu’il ne semble dérangé.
EFFECTIF : 5 000 (2007)… les comptages donnent une fourchette entre 2 000 et 10 000… donc, on ne sait pas. On estime que la population baisse de 2 à 3% par an.

L’ ours à lunettes est :
– le seul ours d’Amérique du Sud et le seul représentant du genre Tremarctos.
– le seul représentant des ours à face courte, ancêtre préhistorique des ursidés.
– l’ursidé (8 espèces) le plus rare après le panda géant.
– l’ursidé le plus végétarien (à 96%) après le panda géant.


Photo 1 à 5 : Femelle avec ses oursons
Ces clichés ont été pris depuis le belvédère des condors, juste avant l’entrée ouest de la réserve écologique d’Antisana. Les ours étaient sur le versant d’en face, à la recherche de nourriture de 16h30 à la tombée de la nuit. Il y a 22 ours à lunettes sur le massif d’Antisana en 2022.
Antisana ; Equateur (août 2022).

OU?
L’ours à lunettes est présent sur la Cordillère des Andes depuis le Venezuela jusqu’au Sud de la Bolivie. Sa répartition est en fait très discontinue. Sous la pression de l’agriculture et parfois des chasseurs, il ne subsiste que dans les forêts humides d’altitude, d’où son nom d’ours andin.
L’essentiel des observations concernent 3 pays : la Colombie, le Pérou et l’Equateur. Rapporté à la superficie et à la pression d’observation, on retiendra que la Colombie et l’Equateur restent les destinations à privilégier pour tenter de l’observer.

Les meilleurs spots pour le voir sont :
1 – la réserve de Maquipucuna à Pichincha (Equateur) : cette réserve privée se situe à 2 heures de route de Quito sur les paroisses de Calakali, Nanegalito et Nanegal. C’est une forêt de nuages avec des aguacatillos (Meliosma herbertii), un arbre qui mesure jusqu’à 20 m de haut (généralement plutôt 8 à 10) et qui produit un fruit du type avocat. C’est ce fruit, riche en lipides, qui attire les ours.
Ainsi, 2 fois par an, généralement en juin-juillet puis en novembre-décembre, les ours sont nombreux dans le parc. On peut régulièrement en observer dans les arbres. Ils restent 4 à 12 semaines dans cette zone avant de remonter vers la réserve Cotacahi-Cayapas. La saison de maturité des fruits peut fluctuer et il est prudent de téléphoner pour se renseigner. La réserve coûte cher (15$ seul; 50$ avec un guide). On peut camper ou dormir dans un lodge luxueux. Il y a 32 km de sentiers et les touristes qui prennent un guide bénéficient aussi de l’assistance de « traqueurs » qui cherchent les ours dans la réserve et communiquent leurs observations aux guides.

2 – le parc national de Chingaza (Colombie) : ce parc national, à 4 heures de Bogota, date de 1977. Il vise notamment à protéger 2 espèces animales : le conure à poitrine brune et l’ours à lunettes. Les effectifs de ce dernier sont en hausse depuis 2010. Un comptage de 2020 estime la densité à 2.9 ours pour 100 hectares (122 individus sur le parc et sa zone tampon).
C’est un parc pour randonneurs, étagé entre 800 et 4020 m. La plupart des sentiers ont un accès limité à 40 personnes par jour. Il est prudent de réserver les week-end. Même s’il s’agit d’un des meilleurs sites pour voir un ours à lunettes… Rien n’est garanti… Il vaut mieux y consacrer plusieurs jours.

3 – le mirador des ours andins de Pimampiro à Imbabura (Equateur) : Il s’agit d’un belvédère privé (à 3 h de Quito et 1h30 d’Ibarra) face au canyon de la rivière Pisque. Il permet d’observer tout un flanc de montagne parfois fréquenté par des ours. Le belvédère ne permet que de voir des ours de loin (apporter longue vue et téléobjectif). On augmente ses chances en étant présent 2 heures après le lever du Soleil ou 2 heures avant son coucher.
On peut aussi emprunter les sentiers (15$) et loger sur place (25$).

4 – Réserves écologiques de Cayambe-Coca et de Antisana : il y a 22 ours sur le secteur de l’Antisana (2022) et davantage sur le secteur Cayambe-Coca. Les automobilistes peuvent multiplier les arrêts pour inspecter les flancs de montagne sur la route 20 (Pifo, Papallacta, Baeza). Ca circule vite et ce n’est pas pratique mais on peut couvrir du regard de très grands espaces. On peut aussi tenter sa chance sur la route qui monte à la lagune Micacocha. C’est ici, depuis le belvédère des condors (peu avant l’entrée de la réserve Antisana) que j’ai vu les ours présentés en photographie.
Les plus courageux doivent randonner dans ses réserves grandioses malheureusement très souvent cachées sous les nuages.

On retiendra aussi 2 secteurs où il faut ouvrir l’oeil et encore davantage de chance :
– le parc national Podocarpus (5) près de Loja (Equateur).
– le chemin de l’Inca (Pérou) : il y aurait 70 ours à lunettes dans la sanctuaire historique du Machu Pichu.

L’ours à lunette fréquente toutes les altitudes de 300 m à 4750 m. Sur le terrain, il est généralement repoussé en altitude par les terres agricoles.

A l’échelle locale, l’ours à lunettes fréquente surtout les forêts. Il aime grimper dans les arbres et se construit souvent des plates formes pour dormir. Pour observer un ours à lunettes, il faut concentrer ses recherches sur l’écotone entre la forêt de nuage et le bas paramo. Cette lande d’altitude offre une visibilité beaucoup plus favorable.

La taille du territoire est très variable :
– 16 000 ha pour un grand mâle.
– 4 000 ha pour une femelle.
Dans la pratique, il peut rester très longtemps sur une toute petite zone si la nourriture est disponible.

QUAND ?
L’ours à lunettes n’hiberne pas. Il est actif toute l’année. On peut donc le voir toute l’année… avec plus ou moins de chance.

Le printemps et le début de l’été sont probablement les périodes les plus favorables pour le voir mais cela dépend de la stratégie choisie et de la disponibilité alimentaire :

Janvier à mars : c’est une période défavorable (surtout en Equateur). L’essentiel des naissances ont lieu en janvier-février. En Colombie, la météo est bien adapté à la randonnée.
Avril à juin : c’est la saison des amours. Les ours se déplacent davantage. C’est le seul moment ou on peut espérer trouver mâles et femelles ensembles. C’est une période favorable.
Juin à juillet : c’est probablement la meilleure période : les fruits sont souvent mûrs dans la réserve de Maquipucuna. La météo est généralement favorable aux observations en montagne en Equateur. C’est la meilleure période dans ce pays.
Août : la météo reste favorable (en Equateur) mais les ours sont dispersés.
Septembre et octobre : c’est la 2e période défavorable. Ni la météo, ni le comportement des animaux ne facilitent la recherche.
Novembre et décembre : c’est un moment favorable avec souvent une 2e période de fruits mûrs (Equateur) et une météo favorable (Colombie).

L’ours à lunette est crépusculaire. Les meilleurs moments pour le voir sont le matin avant 9h30 et le soir après 16h30.

COMMENT ?
En roulant lentement en voiture pour observer le flanc opposé des montagnes, en se rendant aux belvédères à pied, en randonnant entre la forêt de nuage et le bas paramo, en rejoignant les zones riches en fruits mâtures… toutes les méthodes sont bonnes pour voir l’ours à lunettes… mais il faut aussi un peu de chance.

C’est un ours inoffensif mais il est conseillé de :
– conserver au moins 10 mètres de distance (davantage avec les jeunes).
– ne jamais entraver son passage.
– éviter contact visuel direct, bruits forts et gestes brusques.
Il n’attaque que pour se défendre en cas de menace.

L’observateur pourra remarquer :
– que chaque individu présente un dessin facial unique avec des lunettes plus ou moins biens dessinées (parfois absentes). C’est la carte d’identité qui permet aux chercheurs de reconnaître les individus.
– que le temps d’activité est presque entièrement consacré à la nourriture.
– que les femelles (70 kg) sont beaucoup plus petites que les mâles (100 à 175 kg) et généralement accompagnées de 1 ou 2 oursons.